Exposition Flop Turn River, Célia Nkala à Paris du 7 septembre au 5 octobre 2024
L'exposition FLOP TURN RIVER - Célia Nkala présente au public le regard de Célia Nkala. Rendez-vous au Galerie Da-end du samedi 7 septembre 2024 au samedi 5 octobre 2024 pour découvrir à Paris cette rétrospective.
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Les artistes de Flop Turn River, Célia Nkala
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Plus d'infos sur l'exposition Flop Turn River, Célia Nkala à Paris
Flop, turn, river. Ces trois termes pris l'un à la suite de l'autre, pour leurs sonorités et leurs brièvetés, ont quelque chose d'une comptine. Les trois phases d'une partie de poker se retrouvent ainsi résumées : le retournement de trois cartes qui précède l'ouverture du jeu, le tournant de la 4ème qui va influer sur le choix des joueurs puis la révélation de la 5ème et dernière carte qui les sanctionne ou les récompense. Très présent dans l'imaginaire populaire, le poker concentre à la fois les notions de hasard et de stratégie et se fait souvent prétexte à une réflexion plus large sur la fortune. Les oeuvres de Célia Nkala que cette exposition propose de rassembler n'ont ainsi pas seulement trait au poker mais plus largement à la notion de destin, à une métaphysique du pari.
L'exposition joue le retournement et les gestes de Célia Nkala, de l'ordre de la transposition, du déplacement et de l'assemblage entretiennent un même glissement qui peut sembler ludique, mais qui n'est pas sans conséquence. Dans cet espace, le rapport aux règles est subvertit ; les pièces d'un jeu d'échecs renvoyées dos à dos dans Sans titre (Armurerie) installe un suspens autant qu'une menace. Le jeu n'est pas un espace dépourvu de violence, même symbolique. Roger Caillois distingue dans son ouvrage Des jeux et des hommes les notions de ludus et de paidia : l'espace de jeu qu'ouvre une règle avec un objectif et la faculté de jouer librement, d'inventer sa fa?on de participer. De nombreuses analogies sont possibles entre le joueur et le spectateur d'une oeuvre d'art qui saura l'apprécier selon des standards définis et ses propres critères.
L'espace d'exposition invite à une forme d'engagement sans que l'artiste elle-même ne fasse autorité. Les formes des pièces Escape Plan sont ouvertes : les labyrinthes dans lesquels nous propose d'entrer Celia Nkala, extraites des pavements des cathédrales de Chartres ou d'Amiens n'ont pas pour but de nous perdre mais au contraire de nous trouver. Le sens du labyrinthe chrétien n'est pas de trouver l'issue d'un piège mais de parvenir au centre et de se connaître soi-même. L'artiste assume ainsi le potentiel initiatique de l'oeuvre d'art et la reconnaissance de l'espace dans lequel on est libre de jouer et de perdre, de se blesser et de se découvrir.
Dans son texte Cosmic trip (ou les vestiges d'un monde à venir) au sujet de la pratique de Célia Nkala, Florian Gaité pointait la fa?on dont l'artiste faisait advenir dans ses oeuvres une cosmologie personnelle. Mentionnant les toupies inversées d'Eternel Retour ou les éléments antinomiques de l'installation Révolutions et sa tête coupée, il soulignait la prééminence du motif de la boucle, la mélancolie aussi de ce rapport circulaire au temps qui pointe la vanité de toutes choses. Le jeu y participe pleinement et le détour par le genre de la vanité, permet une continuité comme dans le tableau d'Adriaen Coorte où une paire de dé figure à côté d'une montre. La galerie Da-end qui s'est souvent revendiquée comme un cabinet de curiosité contemporain renforce cette filiation. Le goût de Célia Nkala pour les matériaux polis et miroitants n'est pas sans rappeler les codes du sacré. Le pari de Pascal et le vertige que le philosophe propose en assimilant le fait de croire ou non en dieu à un rapport de statistique où le gain comme la perte sont infinis pourrait être l'un des sous-textes du malicieux Fortune II. L'acheteur peut ainsi décider si il gratte la pellicule d'or et défait l'oeuvre au profit d'un gain hypothétique ou si il perd l'occasion de savoir si le billet et gagnant et fait le pari de l'artiste, celui d'une valeur qui va au-delà des matériaux. Le jeu, comme le dit également Caillois, n'est pas producteur de valeur mais terrain d'échanges.
Le tarot dont l'ambivalence est d'être à la fois un jeu et un support divinatoire a tout particulièrement intéressé Célia Nkala qui a d'ailleurs souhaité inviter une cartomancienne dans l'antichambre de l'exposition. Dans cette discussion avec les cartes ce n'est plus seulement une distraction, un divertissement qui se joue mais un réel questionnement aux dimensions existentielles. Quelle est la main que l'on a et la meilleure fa?on de jouer sa part ? Se gardant bien de dire si elle y croit ou non, l'artiste concentre dans Les coupes l'importance inconsciente que l'on accorde aux signes et qui nous amène à prendre certaines décisions. Certains jeux ont ainsi valeur d'oracles, mais ici comme les dés suspendus d'Abolition du hasard, aucun n'évoque une issue en particulier. Le travail de l'artiste est ainsi comme la tranche d'un jeu pile ou face : dans son suspens même, son retardement se joue la possibilité d'un monde.
Henri Guette
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