Exposition Blooming à Paris du 13 septembre au 23 décembre 2024

Du vendredi 13 septembre 2024 au lundi 23 décembre 2024

Galerie Ceysson & Bénétière Paris

Prix: Gratuit

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Plus d'infos sur l'exposition Blooming à Paris

À Saint-Etienne, la galerie Ceysson & Bénétière présente Blooming, une exposition monographique d'Yves Zurstrassen, jusqu'au 23 novembre 2024. Combinant collages, décollages, utilisation du pochoir et techniques contemporaines, les oeuvres de Zurstrassen sont des compositions multicouches, minutieusement construites. Ses tableaux rappellent les rythmes improvisés et non structurés du free jazz : l'artiste belge peint comme on compose de la musique.

L'art est un faire, c'est ce qui vient a? l'esprit en entrant dans les ateliers d'Yves Zurstrassen, quand aussito?t la profusion des images incite a? entrer dans le protocole invarie? du travail de l'artiste pour en de?couvrir la singularite?, la minutieuse orchestration des formes de papier pre?alablement de?coupe?es et de?pose?es sur la toile, les recouvrements successifs de peinture et les de?collages, pour parvenir a? cette e?piphanie de l'image re?ve?le?e lorsque le tableau est termine?.

Voila? pre?s de 40 ans en effet qu'il installe dans ce « faire » les conditions de re?apparition d'une image ou? se de?forment, se transforment et se perpe?tuent les e?changes qu'il entretient avec l'histoire de l'art, avec tous ces peintres longuement regarde?s et qui ont cre?e? en lui cette trame me?morielle avec laquelle il peint et re?invente dans un « performatif » ou? ce sont les attitudes qui deviennent formes, dans un agir tre?s vitaliste et quasi musical fait de ruptures, de re?pe?titions, de de?clinaisons d'un me?me the?me.

Les toiles re?unies dans cette exposition Blooming, re?centes pour la plupart, apparaissent comme une proposition polytonale, a? la fois visuelle et musicale. Une proposition expressive dans la re?pe?tition d'un me?me processus, faite de motifs ornementaux ou picturaux a? la fois semblables et dissonants qu'il nous faut entendre comme des motifs musicaux quand on sait, en effet, que l'artiste peint comme on compose de la musique et avoue que le jazz l'accompagne en permanence. « Je suis comme un musicien, confie-t-il. Parfois je joue seul, parfois je joue avec d'autres peintres autour de moi. Dans ma me?moire, dans mes mains, il m'arrive de jouer en quartet ou plus : en formation de grand orchestre... »

Alors, dans la mise en mouvement des formes et des couleurs, dans cette simplicite? apparente et hautement contrapunctique, comment ne pas entendre le Blue note d'un morceau de jazz dans sa se?rie des Indigo, un morceau de Miles Davis dans sa se?rie des Enigma, un Free time ge?ne?ral dans le solaire des Sunny day et des Summertime qui lui permet, en dehors de toute mesure musicale ou de signature rythmique, d'installer sur ses toiles quelque chose d'immate?riel, d'intuitif et de fluide, comme une improvisation de jazz doucement re?veille?e par des e?clats polyphoniques. Un Free time comme s'il s'agissait de peindre entoure? de ses amis jazzmen Joe?lle Le?andre ou Evan Parker, dans le bonheur d'un temps libre, un temps libre partage?, une sorte de de?jeuner sur l'herbe ultra contemporain quand tout bruisse de complicite?s heureuses, quand chacun a oublie? son talent et sa virtuosite? pour n'e?tre que simplement la?, ensemble, dans la joie d'un partage musical et esthe?tique, dans l'ade?quation parfaite entre la peinture et la musique.

On entend alors cette joie quand, regardant cet ensemble, s'efface tout ce qui rele?ve de la technique employe?e, oublie?s les pochoirs de papier journal vierge, oublie?es les machines a? de?couper performantes connecte?es a? un ordinateur, oublie?s le collage et le de?collage des formes, la succession d'applications d'ajouts et de retraits, ces couches superpose?es de formes qui s'additionnent ou se soustraient, oublie?s le jeu des arrie?re-plans et les marques d'un temps pie?ge? dans la re?alisation me?me de la toile, la rapidite? du geste, ce futur ante?rieur d'un travail a? l'envers, ne restent que cette joie et l'euphorie d'une sensualite? dansante dans la polyphonie visuelle, la couleur musicale d'une surface ou? des blancs de grande brillance, des bleus profonds, des beiges qui ont garde? le souvenir de l'or et du rose et qui semblent s'e?tre concentre?s dans une harmonie de tons retenus comme pour ne pas s'abandonner a? la de?licieuse facilite? de la couleur co?toient d'autres toiles ou?, au contraire, la couleur explose comme dans un e?te? sans fin.

On voudrait commencer a? peindre, composer ou e?crire dans l'acte poe?tique d'un tout amene? a? soi alors que l'on re?ve de convoquer les paradis de Klee et les inte?rieurs matissiens, les toiles de Shirley Jaffe ou de Rauschenberg, les accords de John Coltrane, de Miles Davis, d'Archie Shepp ou d'Ornette Coleman, le ricercare polyphonique de l'Offrande musicale de Bach, « les le?vres que l'air du vierge azur affame » de Mallarme?, « et l'Infini terrible effara ton oeil bleu » de Rimbaud, le « nous n'habiterons pas toujours ces terres jaunes, notre de?lice » de Saint-John Perse, on voudrait entrer dans cette musique visuelle en soi, celle des pierres a? mica et des ciels parcourus, ceux d'Andalousie et de Provence pour Yves Zurstrassen, oui, on ne peint jamais ni on n'e?crit sur la tabula rasa, on est tous fait d'un parcours qui est notre ve?ritable curriculum.

On voudrait, comme une note joue?e dans sa perfection fait entendre le bruit que fait Dieu en marchant sur le sable, peindre empli de tout cet amene? a? soi, atteindre l'e?panoui resplendissant d'une image re?invente?e, elle montrerait ce Blooming attendu, qui contiendrait alors, par son abstraction me?me, cette part de sacre? « ce glissement vers le religieux de?s lors que s'estompe le sujet » comme le souligne Bernard Ceysson.

Les sept toiles peintes en 2024 pour La Halle des bouchers a? Vienne en sont l'exemple parfait, avec leur tonalite? mine?rale, leur sobrie?te? chromatique, leur lumie?re de pierre cistercienne qui ouvre a? la contemplation et a? la me?ditation.

Yves Zurstrassen revendique cette part de re?invention et de sacre?. Chacun de ses vastes ateliers he?site entre l'usine et le cloi?tre et c'est dans la solitude et le silence, me?me s'il est musical, qu'il compose ses toiles, que survient la revenance des affects et des signes nostalgiques perdus, des images oublie?es ou enfouies, de ses propres souvenirs et des acquis de son expe?rience. C'est dans le silence de ce travail solitaire que re?apparait entre la re?gle impose?e et le risque aventureux, dans la surprise espe?re?e, une image nouvelle, une image-objet.

Chacune des toiles du peintre tente alors, dans son e?panouissement, son Blooming, de de?passer ce qui s'est leve? dans ce fonds propre pour s'imposer a? nous par le regard et l'e?coute, usant tour a? tour de sa force auste?re ou de son e?blouissement solaire, son phrase? en filigrane, sa musique silencieuse mais aussi, parfois, sur des aplats mutiques, de ses e?clats et du rythme fulgurant de formes joyeuses et de?coratives lorsque se produisent les jaillissements et les jubilations de la couleur.

C'est donc au partage de cette joie et a? cette e?closion de la peinture qu'il nous invite. Celle d'un free jazz de tre?s grande liberte?, qui, dans la dilution d'un me?me the?me re?pe?te? de toile en toile ou dans la line?arite? du flux me?lodique propre a? chaque se?rie, peut s'entendre me?me dans le silence des salles. En e?tant un peu attentifs, apparai?tront alors les e?chappe?es atonales, la gamme tre?s blues des dissonances, les grilles d'accord ou tout au moins une sorte de musique e?tale, envahissante, comme celle que l'on entend dans les re?ves e?veille?s, la musique que fait en soi le bonheur de vivre dans la douceur heureuse d'une fin d'e?te? claire, colore?e et tre?s jazzy.

28 juin 2024, Bernard Collet

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